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 Complément cours de filo Foucault [u]surveiller et punir[/u]

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MessageSujet: Complément cours de filo Foucault [u]surveiller et punir[/u]   Complément cours de filo Foucault [u]surveiller et punir[/u] EmptyMer 30 Nov - 18:01

Origine : http://www.univ-tours.fr/ash/polycop/philo/chevalley/foucault/06.htm
Cours de la Fac de Tours

VI. Nouvelle conception du pouvoir: Surveiller et punir: naissance de la prison (1975)


SP est écrit au début des années 1970, ie au moment où Foucault s'engage politiquement pour la première fois, d'une part en liaison avec les problèmes rencontrés à Vincennes et d'autre part en créant le GIP avec un certain nombre d'autres "intellectuels". Cet "engagement" de Foucault est toutefois très différent de celui de Sartre. Foucault dépense son temps sans compter, mais il reste acharné au travail philosophique, expérimentant ainsi en lui-même ce qu'il définira en 1976 comme "l'intellectuel spécifique".

L'histoire du châtiment comme "fonction sociale complexe"
Le problème, là encore, remonte à Nietzsche. Du châtiment, Nietzsche dit qu'il ne s'agit nullement d'une institution destinée à rendre meilleur (sinon "celui qui châtie"…, selon le § 219 du Gai Savoir), ou à dissuader, ou même à exercer une vengeance sous la protection du droit. Le châtiment est plutôt un objet complexe où il faut distinguer deux choses: d'une part l'usage, l'acte, le "drame", donc une procédure; d'autre part le but, l'attente associés à la mise en œuvre de cette procédure (cf. La généalogie de la morale, Seconde Dissertation, § 13; in Oeuvres, op. cit., vol. II, 821). Si la procédure (user d'une dramatisation) est "relativement permanente" dans l'histoire, et antérieure au châtiment lui-même, en revanche la fluctuation au cours de l'histoire du but et de l'attente - que puis-je espérer du fait de punir? - fait que le châtiment n'a plus un sens unique, mais est une synthèse de 'sens'. Impossible à définir, dit Nietzsche (ibid., 822: "tout le passé historique du châtiment, l'histoire de son utilisation à des fins diverses, se cristallise finalement en une sorte d'unité difficile à résoudre, difficile à analyser, et, appuyons sur le point, absolument impossible à définir". Nietzsche cite, en vrac, onze de ces fins diverses. S'il parle d'impossibilité, c'est parce que, comme il le précise quelques lignes plus bas, "n'est définissable que ce qui n'a pas d'histoire").

Foucault reprend la question sous un autre angle, en analysant le châtiment comme une procédure de problématisation, ie comme une transformation "des difficultés et embarras d'une pratique en un problème général" (cf. "Polémique, politique et problématisations", entretien de mai 1984, in DE IV, 598 - Cf. aussi plus loin l'introduction de UP, où Foucault fait de la problématisation la notion fondamentale de l'ensemble de son oeuvre). Sous cet angle, le châtiment cesse définitivement de relever d'une morale quelconque. Il condense un ensemble de réponses. Il est une fonction sociale complexe, un élément de la tactique politique (les méthodes punitives sont à voir comme des "techniques" de pouvoir), une étape dans un "processus 'épistémologico-juridique'" défini par le croisement du droit pénal et des sciences humaines.


Du "supplice" des corps à la "surveillance" des âmes
Dans le châtiment, il est question de la manière dont le corps est investi par les rapports de pouvoir (SP, 28). Surveiller et punir commence avec la transcription du supplice de Damiens. Mais le problème que pose Foucault est celui de la disparition progressive des supplices. Œuvre des lois et de grands codes pénaux des XVIIIe et XIXe siècles: le corps dépecé, supplicié, amputé disparaît en quelques dizaines d'années. La "prise sur le corps" se dénoue. L'affrontement physique cesse d'être mis en scène. Le contact se réduit entre la loi et le corps du criminel. Ce qui nous semble pure barbarie primitive se change en douceur pénale. Question: s'agit-il d'un adoucissement des mœurs? Oui, dans les faits. Mais il faut voir que cet adoucissement est plutôt un déplacement du but, de l'attente, des moyens de la procédure punitive. Car si l'on ne découpe plus les corps, on se met à punir les âmes (souffrance invisible, silencieuse, décente à tous égards).

L'objet historique de Foucault dans Surveiller et punir est donc ce passage du corps à l'âme comme cible de la procédure juridique de la punition (Foucault cite à l'appui G. de Mably, demandant en 1789 "Que le châtiment, si je puis ainsi parler, frappe l'âme plutôt que le corps": SP, 22). Mais l'âme, cela ne veut rien dire. Aussi bien ce dont il s'agit est, plus précisément, d'une transformation de la manière dont le corps (corps-âme, indissociablement) est investi par les rapports de pouvoir. Le corps n'est plus tranché dans sa chair, mais dans ses processus mentaux et affectifs. On va juger le personnage du criminel, évaluer sa moralité, quantifier son degré de folie, calculer la probabilité de le redresser, de le guérir pour qu'il redevienne un citoyen normal, etc. Même l'objet "crime" change: on punit l'agressivité dans l'agression, le désir dans le meurtre, la perversion dans le viol. On punit, dans l'acte, la passion qui l'a, dit-on, causé. La douceur pénale, dit Foucault, est une technique de pouvoir. On entre ainsi, dit alors Foucault, dans une forme de pouvoir associée moins à l'Etat lui-même qu'à la surveillance. Le corps se révèle comme une réalité biopolitique. L'analyse du châtiment, transformé en concept par référence à la problématisation de pratiques qu'il condense, fait donc voir l'âme moderne dans l'exacte mesure où elle fait voir que désormais les individus se constituent comme tels à travers leur conformité tacite aux normes des procédures diffuses d'un pouvoir qui leur impose des "formes de vie" et des manières de se conduire.


Le pouvoir comme surveillance et la forme fondamentale du Panoptisme

Dans des entretiens postérieurs à la publication de SP, Foucault a précisé quelles étaient certaines de ses hypothèses de travail: cf. notamment "Entretien sur la prison: le livre et sa méthode", in DE II, 740-753.
Ce texte désigne comme l'hypothèse générale du livre l'idée qu'il se produit, au XVIIIe et au début du XIXe siècle, un changement dans le mode de l'exercice du pouvoir, corrélatif de la disparition de la monarchie, et de l'idée que le souverain avait tout droit de punir. Ce changement accompagne la montée en puissance de la bourgeoisie, qui instaure un nouveau rapport à la richesse: un rapport qui ne passe plus fondamentalement par la transmission héréditaire d'un patrimoine foncier (lié à la terre), mais qui suppose l'exploitation par une classe particulière de la population (la classe ouvrière) d'une richesse investie (machines, usines, etc.): c'est le travail qui produit la richesse. Dès lors, il devient impératif de surveiller les ouvriers. Cf. "Entretien sur la prison", 1975, in DE II, 741: "…le moment où l'on s'est aperçu qu'il était, selon l'économie du pouvoir, plus efficace et plus rentable de surveiller que de punir. Ce moment correspond à la formation, à la fois rapide et lente, d'un nouveau type d'exercice du pouvoir, au XVIIIe siècle et au début du XIXe".

Mais comment surveiller toute une catégorie de la population, et en même temps l'empêcher de se révolter? Par exemple en la moralisant: d'où les "formidables campagnes de christianisation" de la classe ouvrière. Par exemple aussi, en l'opposant à une autre catégorie de la population: les "délinquants". Mais cette catégorie n'existait pas au XVIIIe s., sinon sous une forme très hétérogène et nomade. Pour la faire exister, on organise le système des prisons. Ce qui engendre la population des délinquants, au XIXe s., c'est la prison. "Mon hypothèse est que la prison a été, dès l'origine, liée à un projet de transformation des individus (…). L'échec a été immédiat, et enregistré presque en même temps que le projet lui-même. Dès 1820, on constate que la prison, loin de transformer des criminels en des gens honnêtes, ne sert qu'à fabriquer de nouveaux criminels ou à enfoncer encore davantage les criminels dans la criminalité." (ibid., DE II, 742). La prison produit la délinquance, et elle entrave par ailleurs la réinsertion. L'étape suivante est de constater qu'"à cause" de la prison, il faut développer une police, qui pourra surveiller les anciens délinquants, et donc aussi les ouvriers.
On a ainsi un enchaînement très logique: nécessité de surveiller les ouvriers pour protéger la richesse investie ?? moralisation + prison ?? production de délinquants ?? obligation d'une police. "Il a fallu absolument constituer le peuple comme un sujet moral, donc le séparer de la délinquance, donc séparer nettement le groupe des délinquants, les montrer comme dangereux non seulement pour les gens riches, mais aussi pour les gens pauvres" (ibid, DE II, 743). D'où, aussi, la naissance de la littérature policière, les faits divers horribles dans les journaux, etc.

Ainsi, faire l'histoire du châtiment pendant la période qui voit se mettre en place le système pénal permet de montrer dans le châtiment, comme on l'a dit plus haut, une "fonction sociale complexe" qui condense un ensemble de réponses à un problème. Ce problème est celui de la surveillance d'une classe de la population. L'organisation de la prison, liée à l'apparent adoucissement des peines, est l'organisation d'une immense procédure de domination des "âmes" dont, pour Foucault, le panoptisme est la forme fondamentale. Cf. "Questions à M. F. sur la géographie" (1976), DE III, 35:
"Par le panoptisme, je vise un ensemble de mécanismes qui jouent parmi tous les faisceaux de procédure dont se sert le pouvoir. Le panoptisme a été une invention technologique dans l'ordre du pouvoir, comme la machine à vapeur dans l'ordre de la production. Cette invention a ceci de particulier qu'elle a été utilisée à des niveaux d'abord locaux: écoles, casernes, hôpitaux. On y a fait l'expérimentation de la surveillance intégrale".


Le rôle de Surveiller et punir dans l'œuvre de Foucault
Le livre sur les prisons représente un tournant dans l'œuvre de Foucault pour deux raisons au moins. La première est que c'est à l'occasion du travail pratique et théorique sur les prisons que Foucault modifie définitivement sa conception du pouvoir. La seconde est que c'est avec SP que Foucault passe d'une analyse presque exclusive des énoncés et du discours à une analyse du visible, des espaces et du regard comme moyens de surveillance. Rendre visible pour surveiller: c'est de là que Foucault en viendra ensuite à une analyse de la surveillance de la chair dans l'histoire de la sexualité, ce qui le conduira à développer la notion de "biopolitique" (pouvoir comme ensemble des procédures de domination qui règlent les corps et les formes de vie).

Revenir sur ces deux points.
Surveiller et punir représente d'abord un élargissement et une transformation de la conception jusqu'alors exclusivement négative que se faisait Foucault du pouvoir. A ce propos, cf. par exemple "Les rapports de pouvoir passent à l'intérieur des corps" (entretien avec L. Finas), in DE III, 229. Foucault y critique comme encore inadéquate la position développée dans L'Ordre du discours, texte écrit, dit-il, "à un moment de transition":

"Jusque là, il me semble que j'acceptais du pouvoir la conception traditionnelle, le pouvoir comme mécanisme essentiellement juridique, ce qui dit la loi, ce qui interdit, ce qui dit non, avec toute une kyrielle d'effets négatifs: exclusion, rejet, barrage, dénégations, occultations… Or je crois cette conception inadéquate. Elle m'avait suffi cependant dans l'Histoire de la Folie (…) car la folie est un cas privilégié: pendant la période classique, le pouvoir s'est exercé sur la folie sans doute au moins sous la forme majeure de l'exclusion (…). Il m'a semblé, à partir d'un certain moment, que c'était insuffisant, et cela au cours d'une expérience concrète que j'ai pu faire, à partir des années 1971-72, à propos des prisons. Le cas de la pénalité m'a convaincu que ce n'était pas tellement en termes de droit, mais en termes de technologie, en termes de tactique et de stratégie, et c'est cette substitution d'une grille technique et stratégique à une grille juridique et négative que j'ai essayé de mettre en place dans Surveiller et Punir, puis d'utiliser dans l'Histoire de la sexualité" (p. 229). (Cf. aussi "Non au sexe roi", 1977, in DE III, 264).

Quant au second tournant inauguré dans Surveiller et punir, il s'agit du passage de l'analyse des énoncés à celle des espaces et du visible, conditions de la surveillance. Ici on peut renvoyer à l'article de Deleuze à propos de SP: "Ecrivain, non un nouveau cartographe" (Critique 343, décembre 1975, 1207-1227; reprise modifiée in Foucault, Paris, Ed. de Minuit, 1986, 31-51). Deleuze y commente la conception fonctionnaliste du pouvoir que propose Foucault - "le pouvoir n'a pas d'essence, il est opératoire. Il n'est pas attribut, mais rapport: la relation de pouvoir est l'ensemble des rapports de forces, qui ne passe pas moins par les forces dominées que par les dominantes, toutes deux constituant des singularités" (p. 35). Et il ajoute ceci: "au fonctionnalisme de Foucault répond une topologie moderne qui n'assigne plus un lieu privilégié comme source du pouvoir, et ne peut plus accepter de localisation ponctuelle (il y a là une conception de l'espace social aussi nouvelle que celle des espaces physiques et mathématiques actuels, comme pour la continuité tout à l'heure)" (p. 34).

En quoi cette conception de l'espace social est-elle nouvelle? En ceci que l'idée d'une présence diffuse des mécanismes de pouvoir à travers la totalité de l'espace social permet de comprendre qu'à partir de la fin du XVIIIe s., le pouvoir n'est plus fondamentalement quelque chose qui commande, décrète, interdit, au nom d'une instance de souveraineté, mais quelque chose qui gère tacitement les corps et les vies de tous, et qui pour cela doit surveiller ces corps et ces vies. Dès lors, les espaces où agissent ces mécanismes de pouvoir sont des espaces où corps et vies doivent pouvoir être rendus visibles. L'Archéologie du savoir, dit Deleuze, proposait la distinction de deux sortes de formations pratiques, les unes "discursives ou d'énoncés, les autres "non-discursives" ou de milieux (…). SP opère un nouveau pas. Soit une "chose" comme la prison: c'est une formation de milieu (le milieu "carcéral"). Alors que le droit pénal concerne l'énonçable en matière criminelle, la prison, de son côté, concerne le visible: non seulement elle prétend faire voir le crime et le criminel, mais elle constitue elle-même une visibilité, elle est un régime de lumière avant d'être une figure de pierre, elle se définit par le "Panoptisme", c'est-à-dire par un agencement visuel et un milieu lumineux où le surveillant peut tout voir sans être vu, les détenus être vus à chaque instant sans voir eux-mêmes (tour centrale et cellules périphériques). Un régime de lumière et un régime de langage ne sont pas la même forme et n'ont pas la même formation (…). Ce que "L'archéologie" reconnaissait, mais ne désignait encore que négativement, comme milieux non-discursifs, trouve avec SP sa forme positive qui hantait toute l'œuvre de Foucault: la forme du visible, dans sa différence avec la forme de l'énonçable" (p. 40).[/u]
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